Petit abécédaire de psychanalyse
D’abord rejetons cet homme moyen qui […] n’existe pas, c’est seulement une fiction statistique, il existe des individus et c’est tout. […] je pense à tous les patients que j’ai vu passer sur le divan de mon cabinet en quarante années d’écoute. Il n’y en a pas un qui soit de quelque façon semblable à l’autre, pas un avec les mêmes phobies, les mêmes angoisses, la même façon de raconter, la même peur de ne pas comprendre.
Jacques Lacan, Entretien avec Emilia Granzotto, 1971
A comme Analysant / Argent
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comme Analysant – Se mettre au travail de l’analyse
Analysant est le seul néologisme de Lacan qui soit vraiment entré dans le langage courant. Avant lui on parlait de l’analysé ou du psychanalysé et on parle toujours du patient. Le terme d’analysant ou de psychanalysant dit beaucoup mieux la position active de celui qui fait une analyse et effectue là un véritable travail.
comme Argent – Le prix de l’analyse
Une psychanalyse n’est pas l’affaire de quelques séances, une psychothérapie non plus d’ailleurs. Le montant des séances se discute au cas par cas lors des premiers entretiens, qu’on a coutume d’appeler entretiens préliminaires.
B comme Bavardage
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comme Bavardage – Parler en analyse porte à conséquence
Il est arrivé à Jacques Lacan de dire que la psychanalyse est une pratique du bavardage. Mais un bavardage qui, parce qu’il est pris au sérieux, porte à conséquence. L’interprétation consistant souvent à simplement saisir, en le soulignant, ce qui est dit – et qui ne peut, une fois sorti de l’ombre, y retourner si facilement.
C comme Conseil / Conformisme / Curriculum Vitae
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comme Conseil – Une chose dont un psychanalyste doit se garder
Au nom de quoi un psychanalyste donnerait-il des conseils ? Ce serait ramener son action à l’exercice d’une suggestion, où ce qui est conseillé ne peut que dépendre de ce qui constitue le conseilleur comme persona, son milieu, son éducation, ses a priori moraux et culturels, bref, tout ce qui fait sa conception, à lui, de la réalité.
comme Conformisme – Où versent trop souvent les psychanalystes
Pourquoi sur un plan politique ne retient-on de Freud que le pessimisme anthropologique de Malaise dans la civilisation (1929) ? Pourquoi oublie-t-on son soutien à la Policlinique de Berlin (i pour y, comme dans politique) qui concrétisait son idée de « sanatoriums psychanalytiques » destinés aux plus démunis ? Pourquoi oublie-t-on sa prise en considération des déterminismes sociaux et des « laissés pour compte » exploités par « des privilégiés » qu’il exprime aussi tard que dans L’avenir d’une illusion (1927) ? Dans L’héritage politique de la psychanalyse, Florent Gabarron-Garcia montre comment cet héritage a été refoulé et comment, dépolitisée, la psychanalyse se cantonne trop souvent à un conformisme stérilisant.
comme Curriculum Vitae – Psychanalyste mais aussi…
Exerçant comme psychanalyste avec les adultes et les enfants depuis 1995, j’ai aussi travaillé avec des enfants et des adolescents en CMPP, avec des adolescents en hôpital de jour et j’interviens toujours dans une pratique à cheval entre psychothérapie et accompagnement éducatif avec des jeunes de l’Aide Sociale à l’Enfance pour le compte d’une association nommée Thélèmythe. J’ai également exercé longtemps comme directeur d’appartement thérapeutique pour des adultes dits psychotiques. Depuis trente ans j’effectue aussi ce qu’on appelle des supervisions et des analyses de la pratique dans tous types d’institutions.
D comme Diagnostic / Divan
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comme Diagnostic – Une deuxième chose dont un psychanalyste doit se garder
Freud conseillait d’accueillir chaque nouveau cas en oubliant tout ce qu’on sait. Exercice difficile s’il en est, mais qui est pourtant la condition sine qua non pour arriver à entendre ce qui est propre à chacun et qui ne rentrera jamais dans aucune case. Façon d’essayer de se dégager de ce que nous avons appris à entendre et que nous avons déjà entendu. Exit donc, pour commencer, les classifications psychiatriques et leurs diagnostics.
comme Divan – Parmi les outils du psychanalyste
Le divan est l’objet emblématique de la psychanalyse dans les représentations populaires. Il n’est pas indispensable de s’y allonger pour effectuer une psychanalyse. C’est un artifice pour se dégager de l’emprise du regard, du face à face, de ce rapport de personne à personne, qui régit les rapports humains habituels – le but étant de faciliter l’émergence du discours inconscient.
© DR
E comme École de psychanalyse / École lacanienne de psychanalyse
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comme École de psychanalyse – D’un lieu qui participe à la formation des psychanalystes
Les écoles de psychanalyse en France sont diverses. Le tableau ci-dessous établi par Yann Diener suffit à le montrer.
Elles sont, à côté de son analyse et des supervisions qu’il a suivies, un élément important de la formation du psychanalyste et de la transmission de la psychanalyse. Elles peuvent avoir des conceptions très différentes sur ces sujets et être structurées de bien des manières.
comme École lacanienne de psychanalyse
L’École lacanienne de psychanalyse, à laquelle j’appartiens, pratique la passe. Elle n’est pas structurée sur un mode hiérarchique et ne reconnaît qu’une seule qualité de membre. Avec ces quelques 180 membres, elle n’a jamais visé l’extension et le nombre. Très active, elle comprend une quinzaine de revues et maisons d’éditions.
F comme Folie / Fréquence
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comme Folie – Si les psychanalystes accueillent la folie, nul besoin d’être fou pour consulter
Que l’on dise, avec le psychiatre Henri Ey, que la folie est une « pathologie de la liberté », c’est-à-dire comme ce qui aliène et prive de liberté, ou que l’on dise avec Jacques Lacan que « l’être de l’homme, non seulement ne peut être compris sans la folie, mais il ne serait pas l’être de l’homme s’il ne portait en lui la folie comme limite de sa liberté », il reste que la folie est inhérente à la condition humaine et que la peur de la folie est, avec celle de la mort, la peur la plus partagée par les humains. On l’entend jusque dans ce lieu commun souvent avancé, « Les psy c’est pour les fous ! » – par lequel on s’épargne souvent de consulter. Renvoi vers foliesophie
comme Fréquence – Hebdomadaire, bihebdomadaire ou plus
Tout comme leur prix, le rythme des séances se discute lors des premiers entretiens.
G comme Guérison
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comme Guérison – « Un bénéfice de surcroît »
En disant que la guérison est le bénéfice de surcroît d’une psychanalyse, Lacan a pu choquer. Bien sûr que le psychanalyste a le souci d’améliorer la position du sujet souffrant qui vient à lui, mais il ne se règle ni sur la disparition des symptômes ni sur la guérison comme but. Il se règle sur l’émergence du discours inconscient, d’où résulte… ce bénéfice.
H comme Hypnose
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comme Hypnose – Une troisième chose dont un psychanalyste doit se garder
Freud a inventé la psychanalyse quand il a rejeté l’hypnose qu’il pratiquait. Et chaque analyste doit d’une certaine façon réitérer ce geste en écartant de sa pratique toute suggestion, en laissant à celui qui le consulte sa liberté. Voir Yan Pélissier, « Des psychanalystes empêtrés dans leurs dévoilements ».
I comme Inconscient / Interprétation
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comme Inconscient – Sans quoi la psychanalyse n’aurait jamais existé
L’inconscient n’est pas simplement le non conscient, ce qui n’est pas présent à la conscience, dont philosophes et psychologues ont parlé bien avant Freud. Dans l’interprétation des rêves, celui-ci montre que l’inconscient est soumis à des lois, dont le déplacement et la condensation que Lacan va identifier comme des figures linguistiques, métaphore et métonymie. D’où la formule fameuse : « L’inconscient est structuré comme un langage ».
Il est difficile de nier que Freud, tout au long de La Science des Rêves, ne parle que de mots, de mots qui se traduisent. Il n’y a que du langage dans cette élucubration de l’inconscient. Il fait de la linguistique sans le savoir, sans en avoir la moindre idée. Il va même à se demander si le rêve a une façon d’exprimer la négation.
Jacques Lacan, Ouverture de la section clinique, 1977
I comme Interprétation – Savoir user de l’équivoque
L’interprétation consiste souvent à faire entendre à l’analysant ce qu’il dit et qu’il ne se savait pas en train de dire. C’est pour cela qu’elle n’est pas explication, mais qu’elle use plutôt de l’équivoque et de l’énigme. C’est pour cela aussi que la révélation sur ce qui s’est joué dans une séance ne vient souvent qu’après coup à l’analysant.
J comme Jeune
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comme Jeune – Recevoir des enfants en thérapie
Recevoir des enfants en thérapie est une pratique, par bien des côtés, plus délicate que de recevoir des adultes. Parce que les tout petits ne parlent parfois pas encore. Parce que les plus grands ne sont pas non plus immédiatement portés à parler. Ce qui les préoccupe est alors mis en scène par le dessin, le modelage et le jeu. Et puis, surtout, la partie se joue aussi avec les parents, ce qui la rend plus complexe.
K comme cas
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comme… Cas – Sur ce que le psychanalyste a entendu, motus et bouche cousue
Les cas rapportés par les psychanalystes aujourd’hui sont le plus souvent de courtes vignettes cliniques. Contrairement aux célèbres cas de Freud qui étaient l’occasion d’inventer une théorie, elles fonctionnent au contraire comme de simples applications d’une théorie et… faire-valoir de la finesse clinique de leurs auteurs. Quoiqu’il en soit, pour un psychanalyste, faire cas d’une parole n’est-ce pas précisément ne jamais faire cas publiquement de ce qu’on lui a confié ? Se taire radicalement.
L comme Linguistique / Linguisterie / Lalangue
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comme Linguistique – Période structuraliste de la psychanalyse
1er temps : prenant acte du fait que les formations de l’inconscient, rêves, lapsus, actes manqués et symptômes se déchiffrent, Lacan a avancé que « l’inconscient est structuré comme un langage » et il a pris appui sur la linguistique structurale pour tenter de donner un statut de science à la psychanalyse.
L comme Linguisterie et Lalangue– Quand la psychanalyse quitte le structuralisme
2nd temps : Lacan condense la langue en lalangue pour souligner qu’elle émerge toujours chez l’être humain sur le mode du bébé qui lalale – de la lalation. Avec ce terme comme avec celui de linguisterie, il va ainsi donner congé à la linguistique. Comme il le dit dans le séminaire Encore, à partir du moment où l’inconscient est découvert tout ce qui est du langage ne relève pas du linguiste.
M comme Malaise / Motérialisme
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comme Motérialisme – La psychanalyse quitte le structuralisme… sans lâcher la structure
2nd temps, suite : en inventant le terme de motérialisme, Lacan souligne que ce qui crée la structure (qui ne préexiste donc pas en tant qu’entité abstraite qu’on appelle langage), ce qui permet que l’inconscient prenne, c’est tout un bric-à-brac d’expressions, de mots, de bouts de mots, de lallations. Lacan parle de « débris » et de « détritus », qui vont passer au travers de chacun, « avec lesquels il va jouer, avec lesquels il faudra bien qu’il se débrouille ».
comme Malaise – Quand les psychanalystes jouent aux psychiatres
Comment des psychanalystes en sont-ils arrivés à endosser les habits du psychiatre, (jouant à fond de ce que Foucault a nommé « pouvoir psy ») au point d’être aujourd’hui quasiment les seuls à mener encore des présentations de malades ? Et comment en sont-ils arrivés à s’emparer de la psychopathologie psychiatrique pour la raffiner, jusqu’à se concevoir eux, psychanalystes, comme structurellement différents de ceux qu’ils épinglent comme psychotiques ?
N comme Névrose
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comme Névrose – D’une complicité entre psychiatres et psychanalyste
Névroses, psychoses et perversions forment un trio diagnostique que la psychiatrie et la psychanalyse ont fomenté ensemble entre la fin du XIXème siècle et les années 60. Freud et Lacan y ont contribué, ce dernier en distinguant des mécanismes propres à chacune des catégories, refoulement pour la névrose, forclusion pour la psychose et déni pour la perversion. Aujourd’hui, la question pour les psychanalystes reste de se déprendre de ce savoir mâtiné de psychiatrie. Voir Jean Allouch, « Pertubations dans pernépsy » ; Yan Pélissier, « Psychopateaugeoire ».
O comme Œdipe / Oubli
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comme Œdipe – Un incontournable de la psychanalyse
comme Oubli – Oublier n’est pas ce que l’on croit.
Freud souligne dans « Répétition, remémoration, perlaboration » qu’oublier n’est pas un effacement des évènements, leur portée générale leur est plutôt enlevée en les isolant les uns des autres : « L’oubli d’impression de scènes, d’évènements vécus se réduit généralement à une dissociation de ceux-ci. Lorsque le patient vient à parler des faits oubliés, il omet rarement d’ajouter : ”À vrai dire, je n’ai jamais cessé de savoir tout cela, mais je n’y pensais pas” »
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P comme Passe / Patient / Pouvoir psy / Psy
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comme Passe – Comment passe-t-on d’analysant à analyste ?
La passe est un dispositif inventé par Lacan pour, comme il le dit, arriver à appréhender « comment quelqu’un, après une expérience analytique, [peut] se mettre en situation d’être analyste ? » Certaines écoles de psychanalyse, comme l’École lacanienne de psychanalyse, la mettent en œuvre, d’autres non. Pour en savoir plus.
comme Patient – Un qualificatif douteux en psychanalyse
Patient, emprunté au latin patiens « endurant, qui supporte » sans murmurer les adversités et les contrariétés. En philosophie c’est aussi celui qui subit, puis en médecine cela devient le malade. Analysant convient quand même beaucoup mieux pour désigner celui qui s’engage dans une psychanalyse !
comme Pouvoir psy – Quand le psychiatre cherche à contraindre le « malade mental »
« Pouvoir psy », par ces termes Michel Foucault entend tout un dispositif par lequel le psychiatre fait jouer la réalité comme pouvoir, c’est-à-dire par lequel il cherche à contraindre le malade mental à accepter ladite réalité, celle du psychiatre s’entend. La critique de Foucault rejoint celle de Lacan à l’endroit des psychothérapeutes quand il ramène leur action à l’exercice d’une suggestion.
comme Psy… – Psychiatres, psychologues, psychothérapeutes… psychanalystes
Pas toujours facile de s’y retrouver entre ces appellations. Tous s’inscrivent dans une pratique qui est aussi ancienne que l’humanité : guérir par la parole. Psychiatres, psychologues et psychothérapeutes exercent au nom de diplômes ou d’habilitations reconnus par l’état. Les psychanalystes, qui ont souvent l’un ou l’autre de ses diplômes, n’exercent que d’avoir eux-mêmes traversé l’expérience d’une psychanalyse.
Q comme Queer
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Q comme Queer – Une psychanalyse trop dans les clous
Pas assez queer la psychanalyse, straight le plus souvent. Jusqu’en 1974 les psychanalystes américains ont tenu l’homosexualité pour une maladie et, encore aujourd’hui nombre de psychanalystes considèrent que transgenre équivaut à psychose. Et que dire du soutien au modèle familial le plus traditionnel au nom d’un concept. Celui, lacanien, de Nom-du-Père a beaucoup servi dans ce sens-là. E.P.E.L., la maison d’édition de l’École lacanienne de psychanalyse est le premier et principal éditeur en France de travaux érudits des études gay et lesbiennes.
R comme Rêve
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comme Rêve – Emprunter la voie royale vers l’inconscient ou… les petits chemins
« Le rêve est un rébus », disait Freud, c’est-à-dire une écriture dont les signes doivent être successivement traduits. Le rêve n’est pas l’inconscient, ajoutait-il, il est « la voie royale » qui y mène. À côté de cette voie, d’autres formations de l’inconscient tracent des chemins, les lapsus, les actes manqués, les mots d’esprit, elles aussi établies comme des faits de langages.
OU AUTREMENT DIT
S comme Science / Silence / Spychanalyse / Supervision
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comme Science – La psychanalyse, une science ?
Instaurer la psychanalyse comme science, Freud y a cru, Lacan aussi, dans un premier temps. Constatant que l’inconscient était fait de langage, il a cherché à arrimer la psychanalyse à la linguistique structurale. Mais il a dû se résoudre à ce que « la science de l’inconscient » ne soit qu’une pratique, inscrite dans le champ de la raison certes, mais pas une science, au mieux une « science du particulier ».
Ce que j’ai à vous dire, je vais vous le dire, c’est que la psychanalyse est à prendre au sérieux, bien que ça ne soit pas une science. C’est même pas une science du tout. Parce que l’ennuyeux, comme l’a montré surabondamment un nommé Karl Popper, c’est que ce n’est pas une science parce que c’est irréfutable.
Jacques Lacan, Le moment de conclure, 15 novembre 77
S comme Silence – Psychanalyser, ou l’art de se taire
Le fameux et souvent caricaturé silence du psychanalyste ! S’il peut lui arriver d’être loquace, le psychanalyste a de nombreuses raisons de se taire. Il se tait face aux demandes de l’analysant pour que puisse émerger la demande sous-jacente (qui peut être demande d’amour). Il tait ses sentiments quand il écoute un analysant, même s’il en est ému, bouleversé voire angoissé, il s’en débrouille, n’en parle strictement à personne, si ce n’est éventuellement dans sa supervision. Il tait ses conseils aussi, qui ne pourraient être qu’orientés par l’idée de ce qui serait bon pour son patient et tout imprégné de ses a priori qu’ils soient moraux, liés à son milieu, à son éducation, etc. Et il a encore d’autres raisons de se taire… Voir Jean Allouch, Transmaître.
S comme Spychanalyse – La psychanalyse envisagée comme exercice spirituel
Spychanalyse pour psychanalyse, audacieuse re-nomination proposée par Jean Allouch dans La psychanalyse est-elle un exercice spirituel ? Réponse à Michel Foucault pour faire valoir que la psychanalyse peut être envisagée du point de vue de la spiritualité, précisément de celles des écoles de philosophie antiques. Occasion de démarquer totalement, du même coup, la psychanalyse de la psychiatrie ! Spychanalyse donc.
Dans le marxisme comme dans la psychanalyse, le problème est ce qu’il en est de l’être du sujet (de ce doit être l’être du sujet pour qu’il ait accès à la vérité) et la question en retour de ce qui peut se transformer du sujet du fait qu’il ait accès à la vérité, eh bien ces deux questions, qui sont encore une fois des questions absolument caractéristiques de la spiritualité, vous les retrouverez au cœur même ou en, en tout cas, au principe et à l’aboutissement de l’un et l’autre de ces savoirs.
Michel Foucault, L’herméneutique du sujet, 6 janvier 1982
S comme Supervision – Un lieu pour parler de ses analysants
Les psychanalystes gardent pour eux les dires qu’ils accueillent. Seule exception, pour s’y retrouver, ils leur arrivent d’en parler à un autre psychanalyste dit superviseur ou contrôleur. Termes qui ne sont ni l’un ni l’autre très heureux. Supervision… il ne s’agit pourtant ni d’une position de surplomb, ni de vision, mais plutôt d’une écoute en position seconde. Contrôle… la tonalité persécutive du terme est vraiment malvenue. Si les termes sont contestables, cette pratique est bienvenue.
T comme Thérapie / Thélèmythe / Topologie / Transfert
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comme Thérapie – Psychothérapies versus psychanalyse
Les psychothérapies, qu’elles soient dispensées par des psychiatres, des psychologues ou des psychothérapeutes sont nombreuses. Il est arrivé au psychanalyste Jacques Lacan de dire qu’elles mènent au pire, tout en reconnaissant qu’elles procurent un bien. Paradoxe ? Pas vraiment, dans la mesure où le pire était, à ses yeux, d’agir par la suggestion et que pour lui toute psychothérapie repose en son fond sur une suggestion… inacceptable, donc, même au nom de l’obtention d’un mieux-être.
T comme Thélèmythe – Quand la psychanalyse investit l’abbaye de Thélème
Thélèmythe est une association qui reçoit des adolescents et jeunes adultes entre 16 et 21 ans qui lui sont confiés par l’Aide Sociale à L’Enfance. Elle vise l’insertion sociale de jeunes particulièrement maltraités, par leurs parcours en institution faits de ruptures répétées ou par des parcours migratoires souvent terribles. Je travaille comme thérapeute pour cette association depuis trente ans.
T comme Topologie des surfaces : renverser la représentation de notre moi comme bulle
Lacan a souvent avancé dans son élaboration théoriques avec des figures topologiques mœbiennes (c’est-à-dire unilatères) comme le cross-cap, la bouteille de Klein ou la surface de Boy ou non mœbiennes (c’est-à-dire bilatères) comme le tore. Avec, entre autres, comme enjeu d’essayer d’entamer l’image que nous avons de nous-mêmes et de notre moi comme bulle. Par exemple, nous nous représentons spontanément notre corps comme une sphère alors qu’il est pourtant bien plus correctement représenté par un tore.
T comme Transfert – Pas de psychanalyse sans transfert
Le transfert est le moteur d’une psychanalyse. L’analysant qui commence son analyse transfère d’abord au sens premier. Il répète des prototypes anciens. Freud disait qu’en répétant au lieu de se souvenir, il est d’abord dans l’agieren, dans l’agir. Ce n’est que dans un deuxième temps qu’au lieu d’agir dans la répétition, l’analysant va se souvenir. Se souvenir ne consistant pas, comme on se le représente trop souvent, à se rappeler, mais à mettre les pensées en lien pour en tirer des conséquences, pour que les choses fassent événement.
En répétant des prototypes anciens, l’analysant réveille les sentiments qui y sont attachés. L’amour de transfert qui en résulte devra être soldé pour qu’une analyse puisse être considéré comme terminée. Cet amour, né de l’artifice du dispositif, Freud ne le considérait pas moins comme un véritable amour.
U comme Unebévue
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comme Unebévue – Un inconscient de surface ?
Unebévue, c’est ainsi que Lacan a renommé, par ce qu’il appelle une bizarre traduction, l’Unbewust, l’inconscient freudien. Unebévue comme une bévue, un trébuchement, un lapsus, un acte manqué. Avec cette nouvelle nomination, Lacan reconsidère complètement cet inconscient freudien et lui enlève de cette profondeur qu’on lui a toujours attribué. Voir Yan Pélissier, « Jacques Lacan, poète assez Rousselien ».
V comme Versöhnung
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comme Versöhnung – La fin de l’analyse comme réconciliation 1/2
« La fin que propose à l’homme la découverte de Freud, a été définie par lui à l’apogée de sa pensée en des termes émouvants Wo es war, soll Ich werden. Là où fut ça, il me faut advenir. Cette fin est de réintégration et d’accord, je dirai de réconciliation – Versöhnung. » Jacques Lacan, Écrits, « L’instance de la lettre dans l’inconscient ».
W comme Wo Es war, soll Ich werden
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comme Wo Es war, soll Ich werden – La fin de l’analyse comme réconciliation 2/2
Célèbre formule de Freud qui résume pour lui l’enjeu d’une psychanalyse. Souvent traduite par « Là où le Ça était, le Moi doit advenir ». Lacan, qui l’a souvent commentée, propose entre autres « Là où fut ça, il me faut advenir ». Façon de dire que là où ça parle, dans l’inconscient, je dois, le sujet doit, advenir. Cela souligne qu’une analyse ne sera jamais la promotion d’un Moi triomphant qui ferait place nette du désir inconscient, mais plutôt, comme dit Lacan, d’une reconquête patiente de « ce champ perdu de l’être du sujet ».
X comme Xénopathie
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comme Xénopathie – Quand le grec sert le « pouvoir psy »
Pour décrire le sentiment d’étrangeté, que tout un chacun peut parfois éprouver, les psychiatres parlent de xénopathie. Emprunté au grec, xénopathie distille par lui-même un sentiment d’étrangeté. Car voilà celui qui l’éprouve dûment estampillé – pathie et grec obligent – d’un gros nom de maladie. Un des aspects du « pouvoir psy ».
– À quoi servent les noms qu’ils portent demanda le moucheron, s’ils n’y répondent pas ?
– Ils ne servent à rien pour eux, répondit Alice, mais je suppose qu’ils sont utiles aux gens qui les nomment.
Lewis Carroll, À travers le miroir
Y comme Yan
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comme Yan Pélissier, psychanalyste français
Psychanalyste français exerçant à Paris dans le 19ème arrondissement
Z comme Zen
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comme Zen – Zen, la technique psychanalytique ?
Jacques Lacan a souvent parlé du Zen. S’il a pris grand soin de ne pas pousser la comparaison avec la psychanalyse trop loin et s’il n’a jamais préconisé d’importer ce qu’il lui est arrivé d’appeler les clowneries de la technique zen, « brusquerie succédant à l’attente qui se réalise parfois par un mot, une phrase, une jaculation, voire une grossièreté, un pied de nez, un coup de pied au cul », il a néanmoins souvent souligné une proximité discrète entre cette technique et des façons d’intervenir dans une psychanalyse qui « ne brise le discours que pour accoucher la parole. » Préférable en tout cas à d’autres techniques comme l’analyse des résistances, le conseil et la suggestion qui, toutes, aliènent le sujet.
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